Dans la quête de sa première coupe du monde, l’équipe de France 98 avait dû venir à bout, en huitièmes de finale d’une coriace équipe paraguayenne dont le gardien de l’époque José Luis Chilavert avait cristallisé toutes les attentions.
L’angoisse de l’élimination
Ce soir, la configuration était étrangement ressemblante avec comme homme à planter : Vincent Enyeama, sorte de réincarnation du gardien paraguayen : même goût pour le but adverse (Enyeama a marqué plusieurs pénaltys dans sa carrière), même pouvoir charismatique sur son équipe et même carrure imposante. Alors forcement pour ceux qui se souviennent, le scénario ne pouvait être guère différent. Précipitation, impatience, nervosité et crispation sont les ingrédients de ce genre de confrontations où le doute ne fait que grandir au fur et à mesure que le gardien multiplie les prouesses.
Les huitièmes de finale : un stade ingrat
Les huitièmes de finale sont les premiers pas d’un chemin bordé, de part et d’autre, par les abymes d’un retour au pays. Comme si en pleine fête, la musique pouvait s’arrêter d’un coup sans prévenir. Pour les supposées grandes nations, c’est un rang qui ne sert à rien. Ni ridicule, ni glorieux, ce tour ne vous fait pas rêver quand vous avez connu l’excitation d’une demie ou d’une finale. Au moins l’Italie, l’Angleterre ou le Portugal auront des démissions, des dérives disciplinaires, des retraites internationales, des critiques disproportionnées… Mais ces nations, comme le Brésil, les Pays-Bas, la France, l’Allemagne (et demain l’Argentine) avaient tout à perdre au final. A peine leurs supporters se prêtaient-ils à rêver que leurs espoirs auraient pu prendre fin en 90 voire 120 minutes. Rien d’étonnant donc que l’on assiste à une série de matchs incroyablement crispants avec des équipes favorites qui déjouent et des outsiders qui s’emballent.
Des Bleus solidaires et patients
C’est aussi cela qui rend les coupes du monde si belles car chaque tour offre une psychologie différente, où les qualités pour l’emporter requièrent tour à tour puissance athlétique, forme physique, expérience et enfin technique hors norme pour venir à bout d’adversaires aux profils si variés. Cette équipe de France n’a peut-être pas dans ses rangs un génie, comme Zidane, pour lui permettre d’aller au bout de cette magnifique coupe du monde mais contrairement à son ainé de 98, elle a su montrer davantage de sang-froid et de fraicheur physique pour tromper par deux fois ce “diable” d’Enyeama en 90 minutes et se qualifier pour les quarts de finale. Il n’y pas grand chose à dire individuellement sur ce match car on a le sentiment que c’est en équipe, que les Bleus se sont arc-boutés pour tenir, lorsque plus aucune passe n’arrivait à destination. C’est ensemble qu’ils ont repris l’ascendant dans ce match pour trouver la brèche grâce à une libération plus que jouissive de Paul Pogba.
Il était une fois en 82
Au prochain tour, nous allons vivre, contre l’Allemagne, la 3e manche d’un combat débuté en 82, poursuivi en 86 et qui n’a jamais pu se jouer lorsque la France marchait sur le toit du monde entre 98 et 2001. Cette confrontation de vendredi offre, par ailleurs, le rendez-vous tant redouté depuis le 6 décembre 2013, date du tirage au sort de cette coupe du monde.
A l’issue de ce match, il n y aura peut-être plus rien si ce n’est la satisfaction d’avoir retrouvé une équipe tricolore digne et ambitieuse. Mais qui sait si la France parvient à se libérer comme contre la Suisse, si Deschamps parvient à rappeler à ses joueurs qu’ils n’ont rien à envier à l’ossature bavaroise de la Mannschaft, si la défense allemande affiche autant de largesses que contre l’Algérie alors peut-être que ces Bleus pourront intégrer le cercle des quatre meilleures nations mondiales et nous offrir une dernière semaine palpitante.
Mathieu Ceccarelli
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